Aujourd'hui, c'est chouquetterie
Par Kozlika le samedi 9 octobre 2004, 09:59 - Lien permanent
Ayant la chance d'appartenir désormais à deux tribus, je double ainsi les cérémonies rituelles d'initiation, fêtes votives et autres grands rassemblements de communion mystique. Mercredi soir, c'était Paris-Carnet, tout à l'heure ça sera Chouquetterie !
Mais qu'est-ce donc qu'une chouquetterie ? me demanderez-vous sur le même ton à la fois avide et vaguement dégoûté...
... qu'on a pour évoquer les perversions de peuplades étranges, le même ton en fait que celui qui sera employé pour me demander cet après-midi ce que sont ces « Paris-Carnet »...
Une chouquetterie, c'est le rendez-vous parisien mensuel des toqués lyriques, folles opératiques et amoureux des castafiores qui se fréquentent virtuellement via l'un ou l'autre des forums où l'on en cause. Les chouquetteries ne se déroulent pas dans un bistrot ou un restaurant ni aucun autre lieu public. Non, pour pratiquer nos rites nous avons besoin d'intimité car ce que nous y faisons pourrait choquer un public non averti, spécialement les jeunes. Ceux qui par inconséquence de leur mère (Catherine, la prêtresse du temple) se sont trouvés parmi nous pendant l'office en ont beaucoup souffert, leurs témoignages sont poignants.
Je ne pourrai tout vous raconter car bien sûr tout ne peut être révélé aux béotiens, mais sachez que chaque coréligionnaire doit venir avec, d'une part, des chouquettes ou autres choses douces au palais, et, d'autre part, une pile d'objets du culte, que nous nommons CD ou DVD selon que l'effet qu'ils produisent se porte sur les oreilles seulement ou sur les yeux et les oreilles tout à la fois. La boisson recommandée - quoique non obligatoire - est le cidre, la tenue conseillée est sans chichis, du moment qu'on a les oreilles bien propres.
Les chouquetteries se déroulent dans un brouhaha total, c'est la condition sine qua non pour le bon déroulement du rituel. L'un d'entre nous pose un CD sur la platine ou un DVD dans le lecteur, appuie sur le bouton « Marche » et à ce moment précis où la musique commence il est impératif que les conversations aillent bon train, couvrent autant que faire se peut les décibels qui sortent des hauts parleurs. Pourquoi ? parce qu'on reconnaît que la communion est totale lorsque, au beau milieu de ce charivari, toutes les conversations se taisent d'un coup et qu'un silence que je ne peux qualifier autrement que religieux se fasse au moment précis où LA difficulté de l'extrait se fait entendre. Un doigt se lève (bien souvent celui de Monsieur X., mais notez bien que les fidèles n'en avaient nul besoin), les respirations s'arrêtent brusquement pendant ces quelques secondes bénies entre toutes d'un contre-fa prodigieux, d'un ut miraculeux ou d'un mélisme ravageur. A l'issue duquel un râle de satisfaction sort des lèvres de l'assemblée, un seul souffle, harmonieux, libérateur - osmose, recueillement. Et les conversations reprennent au train où l'on les avait laissées...
Je vous raconterai demain les piliers de notre congrégation, Monsieur X., Dame Catherine, Son Excellence JdeB et bien d'autres, mais il faut pour l'heure que je réfléchisse à ma sélection de ces quelques poignées de secondes que je porterai tantôt sur l'autel.
Commentaires
Je laisse ici un comm qui n'a rien à voir avec le texte ci-dessus pour m'insurger sur un des morceaux présentés sur le juke-box; je ne peux m'empêcher de penser qu'il y a bien meilleur interprète, pour l'extrait des Pêcheurs de Perle: Nicolaï Gedda, dans la version EMI dirigée par Dervaud (1961). Je sais, il s'agit de goûts personnels. Mais j'avais juste envie de montrer mon mécontentement. Parce que les Pêcheurs... ah les Pêcheurs... voilà un opéra qui, pour moi, a été un "ébranlement, un tremblement de terre" (termes du billet sur Lucia).
Merci de ta visite, Extatic,
Je trouve au contraire que ton message a tout à voir avec une chouquetterie, se chiner au sujet de la meilleure interprétation de tel ou tel morceau, ou de la date précise du déclin de tel ou tel interprète... Généralement j'écoute plus que je ne participe, je ne connais pas assez.
Sur les Pêcheurs, Vanzo et Gedda je te répondrai simplement que quant à moi c'est la voix de velours de Vanzo qui me procure le plus "divin ravissement". Gedda, je dis pas que ça n'est pas bien, mais j'aime moins, pour cette aria du moins ; je l'adore par exemple dans Le Postillon de Lonjumeau - au fait, elle manque dans le juke-box celle-là, ça décoiffe !
On ne peut pas laisser de commentaires sur ton blog ?
C'est vrai que c'est drôlement beau Les Pêcheurs... Il faudrait que je mette le duo aussi... Tiens, tu choisirais quelle interprétation pour Au fond du temple saint ?
bonne chouquinade euh chouquinette chouqueterade
....piouf bonne soirée
han je viens de voir la date .... alors finalement .... ça s'est passé comment ? (rires)
aaaaah... mon avis sur les Pêcheurs... je reste plus que fidèle à mon avis précédent et je recommande la même version que précédemment; parce que, dans cet air, Ernest Blanc est absolument sublime. C'est bien simple, à côté, Gedda fait débutant. Et puis, cet air est pour moi la quintessence des Pêcheurs (c'est en général un de mes aires préférés d'opéra de toute façon). Il y a notamment une note qui me tue... à chaque fois... Le seul pb de cette version des Pêcheurs, c'est Leila (Janine Micheau) qui, je m'excuse de le dire si cruement mais... chante comme une pouf de la Star Ac. Mais pour revenir à cet air grandiose, aaaah... quelle extase (je le réécoute en ce moment, c'est pour ça) Quant aux comm sur mon blog, j'ai du les fermer apres insultes, donc le seul moyen, c'est le mail...