Catherine Demongeot dans Zazie

Et puis cette histoire de papa héros me trottait dans la tête à cause du billet de Samantdi (Chacun cherche son papa) qui comme souvent trouve en moi des échos lorsqu'elle évoque son père.

Mon père était parti de Lituanie tout petit avec ses parents et ses frères et sœurs pour fuir les pogroms. Elevé à Paris, il faisait partie de ces dangereux bilingues pas encore repérés par Bénisti qui n'était pas né. Extrêmement dangereux polyglotte même, puisque son père et sa mère, quoique nés tous deux à Vilnius étaient l'un polonais, l'autre russe, parlaient ces deux langues mais surtout le yiddish à la maison. La famille vivait dans le Marais, pas encore envahi par les dangereux gay-priders à cette époque.

En quelles circonstances est-il devenu traducteur chez Gallimard, je n'en ai pas d'idée, d'autant qu'il ne s'agit là que de l'un des nombreux métiers qu'il a exercés, après avoir vendu sa thèse[1] dans l'optique de partir s'installer en Amérique du Sud, puis changé d'avis pour s'engager dans les Brigades internationales, puis vendu des pelisses, devenu correcteur (si si !), monté une entreprise de recyclage de plastique et je ne sais quoi encore, l'objectif principal étant de changer d'activité dès que ça devenait ronronnant.

A un moment en tout cas, dans les années 50, il fut traducteur pour Gallimard et fréquentait Saint-Germain. C'est ainsi qu'il fit connaissance avec des tas de gens dont Raymond Queneau, auquel il devait raconter autant d'histoires rocambolesques qu'à ma mère plus tard. L'histoire ne dit pas si Raymond tomba raide dingue de mon Popa mais ce qui est sûr c'est qu'il tomba raide dingue de son nom et qu'il répétait qu'avec un nom pareil il était indispensable de figurer dans un roman. « Chauffeur de taxi », répondit mon père, tous les chauffeurs de taxi sont russes. Non non, répondit l'autre en substance, c'est d'un banal affligeant.

Affiche du film Zazie dans le métro

Mais chauffeur tout de même. En 1959, paraissait Zazie dans le métro, que j'aime bien citer quand l'occasion m'en est donnée. Un tout petit rôle hein, allez pas croire ! mais ça ne va pas m'empêcher de frimer. Fedor Balanovitch, le guide touristique trimballant son troupeau de touristes en autocar, c'est lui (Balanoff en vrai mais Balanovitch ça sonnait mieux il paraît - quoique cette déclinaison soit impropre mais ne chipotons pas).

Puis l'année suivante, c'était l'année de ma naissance... et de celle du film de Louis Malle avec Philippe Noiret et Catherine Demongeot (et Nicolas Bataille[2] dans le rôle de mon père Fédor).

Allez savoir si sans cette anecdote je serais quand même devenue fan de la bande à Queneau et des oulipiens ?

Voilà, Vroumette je t'avais prévenue que ce n'était rien de grandiose, mais une promesse est une promesse ! La prochaine fois je vous raconterai comment mon ami Marcel est devenu un héros de bande dessinée. Wé, en vrai.

Notes

[1] Mythomanie ou réalité, mystère.

[2] Pas trouvé de photo.